Procès de Joseph-fils
contre Joseph son père Création novembre 2013

1780, Instruction par Joseph fils

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Cahier écrit de la main de Joseph fils vers 1780 qui constitue un mémoire à adresser à un juge dans un litige opposant Joseph fils et ses tantes à Joseph, leur père et frère.
Le principal grief concerne le fait que Marie de Puybusque a déshérité Joseph père au profit de Joseph fils.

En l’année 1708 ou 1709, le sieur Jean-Pierre d’Auriol de Langautier épousa dame Marie de Puybusque qui n’apporta pour dot à son mari qu’une prétention à une modique légitime, qui devait lui revenir de son héritage paternel et maternel, qui n’a pas été encore payée par les parents de ladite dame, et qui a été évaluée à une somme quelconque.

Sans laquelle dot de la dame Puybusque ne se constitua aucun fond sur les biens appartenant au dit sieur Jean-Pierre d’Auriol de Langautier ; il est donc clair et évident que la dame de Puybusque du vivant de son mari n’a jamais eu en propriété aucun de ces bien patrimoniaux de la maison, qui font la matière de cette contestation inouïe survenue entre les sieurs adversaires et des demoiselles ses sœurs conjointement avec le sieur exposant son fils, personne ne conteste les faits.

Le dit sieur Jean-Pierre d’Auriol de Langautier eut de sa femme 12 enfants dont trois sont morts au berceau, et lui en reste neuf, à savoir Jeanne, Joseph, Jean François, Marie-Thérèse, Marianne, Barthélémie-Gertrude, Françoise et Henriette d’Auriol de Langautier, qu’il nourrit, entretien et éleva sa vie durant honorablement et selon leur état.

Vers le mois de septembre 1735, le sieur Jean-Pierre d’Auriol de Langautier fut atteint d’une maladie dans sa maison de Langautier dont il mourut.

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Le 11e jour de ce même mois de septembre de l’année 1735, détenu dans son lit par cette maladie, il fit son testament par lequel il donne et lègue à chacun desdits enfants la légitime telle que de droit, pour leur être payée par l’héritière sus nommée, moyennant laquelle légitime el dit testateur fait ses dits enfants ses héritiers particuliers. Le dit testateur ce fait, institue, et de sa propre bouche nomme pour son héritière et générale ladite dame de Puybusque son épouse, pour par elle après le décès dudit testateur faire et disposer à tous ses grès, plaisirs et volontés l’entière hérédité d’icelui testateur à la charge néanmoins par ladite dame de Puybusque héritière de rendre l’hérédité après son décès à tel des enfants mâles qu’elle trouvera à propos, et laquelle hérédité celui des enfants que ladite héritière aura nommé recueillera en l’état qu’elle l’aura laissée ; aura encore ladite héritière la liberté d’avantager au-dessus de la légitime tel ou tels des enfants qu’elle trouvera à propos et de manière que bon lui semblera. Telles sont les paroles du testateur qui mourut de cette maladie et fut enterré en l’église de la paroisse qu’il habitait et où il décéda.

Des trois enfants males qu’il laissa après sa mort, le second appelé François d’Auriol de Langautier mourut intestat au service qu’il était en qualité de lieutenant dans le régiment de Noailles-infanterie, compagnie de Meulan. Le premier appelé Joseph d’Auriol de Langautier après avoir servi deux ou trois ans en qualité de lieutenant dans le même régiment se retira dans le pays après la mort de son père et se maria quelques temps après avec dame Marie Marguerite Françoise de Montlezun. Le troisième nommé Augustin d’Auriol de Langautier se fit prêtre quelques temps après que son frère eut été nommé au fidéicommis et se fut marié ; et c’est celui qui occupe maintenant la cure de Fenouillet.

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L’on peut noter encore que Jean-François d’Auriol de Langautier était mort ab intestat avant le mariage de son frère et conséquemment avant que la dame de Puybusque n’eut nommé au fidéicommis. Des six filles il n’y en a qu’une qui se soit mariée, et c’est la troisième appelée Marianne qui fut payée de sa légitime des épargnes que la dame de Puybusque avait faites des biens qu’elle s’était réservé pour payer les dites légitimes. Lorsqu’elle céda à son fils de fidéicommis, la quatrième nommée Barthélémie-Gertrude mourut dans la maison de Langautier et fit son testament en faveur d’un de ses sœurs, Marie-Thérèse d’Auriol de Langautier par lequel elle l’institua simplement son héritière générale et universelle de tous les droits qu’elle peut avoir sur les biens de son père.

Des autres quatre filles qui sont celles qui conjointement avec leur neveu le sieur exposant sont maintenant en contestation avec leur frère. La première nommée Jeanne d’Auriol de Langautier a un titre en main par lequel la dame de Puybusque en vertu du testament de son feu mari qui lui donne ses pouvoirs, lui cède la somme de mille écus sur les biens paternels. La seconde appelée Marie-Thérèse outre sa légitime et l’héritage que sa sœur lui a laissé, a un autre titre en main pour pareille somme sur les mêmes biens paternels, laquelle somme lui a été donnée par la dame de Puybusque.

En 1745 ou 1746 l’ainé des enfants males et le second des enfants de feu Jean-Pierre d’Auriol de Langautier appelé Joseph d’Auriol adversaire, ancien officier du régiment de Noailles-infanterie se maria avec dame Marie Marguerite Françoise de Montlezun, et fut nommé au fidéicommis en cadeau de ce mariage par dame Marie de Puybusque héritière du sieur Jean-Pierre d’Auriol de Langautier son feu mari, en vertu du pouvoir qu’il lui avait laissé de restituer l’hérédité à celui des enfants males qu’elle jugerait à propos.

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Cette cession du fidéicommis faite par dame Marie de Puybusque en faveur dudit sieur Joseph d’Auriol de Langautier adversaire son fils légitime et naturel est fondée sur un contrat de mariage qui est passé la même année entre ledit sieur d’Auriol de Langautier et dame Marie Marguerite Françoise de Montlezun fille de feu messire François de Montlezun, marquis de Mauléon Belpech et Campagne, et de dame Jeanne Marie de Villemur des Paillès.

Dans ce contrat de mariage, en second lieu est pacté et convenu qu’en considération de ce mariage, et en faveur d’icelui ladite dame Marie de Puybusque mère restitue au sieur de Langautier son fils acceptant le fidéicommis dont elle s’est chargée par le testament de feu sieur Jean-Pierre d’Auriol de Langautier son mari

Retenu par maître Martin notaire de Caraman le 11 octobre 1735 sous les réservations suivantes qui sont que la dame gardera à soi et à titre de propriété les biens des Langautier, la métairie d’En Baysse, les biens situés dans Bannières avec toutes leurs appartenances et dépendances, ou que le tout soit sciés et situés sans aucune exception, même tous les effets qui sont dans la maison des Langautier et autres bâtiments, dépendants des biens gardés et retenus encore retient à soi la dame de Puybusque toutes et chacune des dettes actives telles qu’elles étaient lors du décès du sieur de Langautier père à l’exception de ce qui peut avoir été exigé par ledit sieur de Langautier futur époux, au moyen desquelles dettes actives ladite dame de Puybusque sera tenue comme elle promet de payer les dettes passives et de nourrir et entretenir et payer les légitimes tout comme elle voudra les fixer aux autres enfants du sieur de Langautier, et la dame de Puybusque qui sera et demeurera déchargée comme ledit sieur de Langautier la décharge du payement de la légitime et de la nourriture et entretien du sieur Augustin d’Auriol son fils et frère cadet dudit sieur futur époux ;

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et ledit sieur futurs époux à qui appartiendra tous les autres biens, meubles, effets et cadeaux dépendants de l’hérédité laissée par ledit feu sieur de Langautier père gardera à soi les dettes actives qui ont pu être contractées en sa faveur ou en faveur de ladite dame de Puybusque touchant les biens vendus et aliénés depuis peu par ledit sieur de Langautier futur époux, lesquelles aliénations ladite dame des Puybusque approuve, et la procuration par elle faite à son dit fils prendra fin, vu que ladite dame de Puybusque dès aujourd’hui fera des réservations par elle faites et des cadeaux qui sont aux biens par elle réservée à ses plaisirs et volontés et en usera tout comme elle a droit de faire en conformité du testament de son feu mari à quoi ledit sieur de Langautier futur époux a consenti, sans quoi la dame de Puybusque n’aurait pas fait ladite restitution du fidéicommis et n’aurait pas nommé son dit fils à l’hérédité de son dit feu père. C’est ainsi qu’est conçu cet article du contrat de mariage du sieur de Langautier adversaire.

Joseph emprunte sans retour de l’argent à Augustin.

On peut noter que le sieur adversaire bien loin de satisfaire à la clause de cet article où il est dit qu’il payera la légitime de son frère Augustin d’Auriol de Langautier et non content de ne lui en payer qu’une partie, il lui a emprunté depuis, huit cent livres qu’il n’a plus voulu lui rendre, quoiqu’il sut bien que son frère en ne les ayant point, les avait emprunté en son nom.

Jeanne et Thérèse gèrent les affaires de leur mère à partir de 1770.
Les sœurs célibataires vivent des revenus des métairies.

Depuis l’époque de ce contrat jusque à sa morte, la dame de Puybusque a joui desdits biens de Langautier, En Baysse et Bannières et de leurs dépendances et appartenances sans qu’aucun de ses enfants s’y soient jamais opposés, excepté six ou huit ans avant sa mort qu’elle se démit du soin de ses affaires et du gouvernement desdits biens en faveur de Jeanne et Marie-Thérèse d’Auriol de Langautier ses filles, qui se chargèrent de payer tous les ans des intérêts convenus aux deux autres légitimaires.

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Réprobation de la conduite de Joseph

Le sieur Joseph d’Auriol de Langautier adversaire, fils de ladite dame de Puybusque s’est toujours donné durant la vie de sa mère qui n’a jamais eu qu’une trop grande faiblesse pour lui, des airs de maître sur ces biens, au mépris de toutes ces conventions et de l’accord qu’il avait passé avec la dame sa mère par son contrat de mariage, et si l’on en excepte le gouvernement desdits biens qu’on ne lui a jamais cédé, il a si bien usé de l’emprise qu’il soit avait sur l’esprit de la dame sa mère, ou si bien caché la négligence qu’il n’a cessé de mettre dans ses affaires propres et les dépenses inutiles continuelles qu’il ne cessait de faire, qu’il a tiré de cette maison par adresse ou autrement presque tout le produit à lui seulement de ces biens pendant trente ans que sa mère en a joui, laissant à peine à la maison de quoi fournir à la dépense de vie et de quoi payer les charges de ces biens ; et il n’est pas encore content, tant l’ardeur et la soif insatiable de confondre dissiper les biens d’autrui aussi bien que les siens propres à empire sur certaines âmes.

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Treize mois avant la mort de la dame Marie de Puybusque désabusée depuis quelques temps sur le compte de son fils le sieur adversaire, n’ayant d’autre vue que de conserver à sa famille et à ses petits-enfants les biens qu’elle s’était réservée, et qui avait été jusqu’alors à l’abri des dissipations de son fils, autorisée d’ailleurs par le contrat de mariage du sieur Joseph de Langautier, qui lui cède la propriété des biens qu’elle s’était réservée, et en représentation légitime de ses autres enfants, fit son testaments l’année 1774, 10e de janvier dans lequel donne et lègue la dame testatrice à MM. Joseph et Augustin d’Auriol de Langautier ses deux enfants males et à demoiselles Jeanne, Marie-Thérèse, Marianne, Françoise et Henriette d’Auriol de Langautier ses cinq filles à chacune la légitime qui pourra les compter sur son hérédité après son décès.

Tel de droit, voulant ladite dame que les demoiselles Jeanne, Marie-Thérèse, Françoise, et Henriette d’Auriol jouissent jusqu’à ce qu’elles seront payées, tant de la légitime qui vient de leur être léguée, que celle qui doit leur revenir du chef paternel, dudit domaine de Langautier, de la maison elle fait sa résidence qui en dépend, de tous les meubles, linges, effets et grains qui se trouveront à son décès, de la métairie d’En Baysse et de celle de la Calèche avec leurs appartenances et dépendances, et telles que ladite dame le jouit actuellement, sans que les dites demoiselles dernières nommées soient obligées de rendre aucun compte de cette jouissance et d’aucune manière quelconque que ce soit ni d’imputer les fruits qui en proviendront sur aucune desdites légitimes, de tout ladite dame testatrice les dispensant par exprès à laquelle somme les dits fruits puissent monter ; voulant au contraire ladite dame testatrice, qu’elle puissent faire jouir et disposer desdits fruits à leur grès, plaisirs et volontés.

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Où Joseph se comporte comme un escroc vis-à-vis de ses enfants Antoine et Victoire.

Davantage donner et léguer ladite dame à M. Jean Charles Philibert Antoine d’Auriol de Saint-Padou et à demoiselle Marie Thérèse Victoire d’Auriol de Saint-Padou firent faire au collecteur chargé de recevoir le paiement dudit bétail des mains du sieur Petit. Le sieur adversaire averti peut-être à temps par ce même collecteur qui pouvait être de connivence avec lui fut lui-même à Toulouse retirer immédiatement des mains du sieur Petit la moitié de l’argent ou l’on avait fixé le prix de ce bétail, c’est-à-dire la somme de 325 livres.

Les demoiselles instruites d’une pareille entreprise firent présenter à monsieur le juge Mage vu le testament de la dame leur mère une requête pour demander qu’il leur soit accordé à raison du restant de la somme dont le terme n’était point encore échu, un baniment entre les mains du sieur Petit, distributeur de l’argent destiné au prix des cadeaux qu’on avait fait refuser.

Termes spécifique au Languedoc pour saisie-arrêt.

Dalloz

Le sieur de Langautier adversaire comptant qu’on n’avait point encore pensé à faire échouer la ruse dont il s’était servi pour extorquer un argent qu’il n’ignorait point lui appartenir, est fort surpris de trouver arrêté cette autre moitié qui ne lui avait pas été encore livrée. En conséquence de ce, il fait assigner les demoiselles sœurs et les sieurs exposant qui pourtant n’était pour rien dans le baniment qu’on avait obtenu, à voir casser ledit baniment sous huitaine.

L’exposant, officier de Jarnac-Dragons, et ne s’appelant pas Antoine est donc Joseph fils.

Pendant que ces choses se passaient ainsi, les demoiselles Langautier sœurs de l’adversaire font assigner leur frère de rendre son argent qu’il avait obtenu que par surprise et qui leur appartenait. Elles firent de plus présenter devant Bret, juge de Caraman et de Lanta une requête pour que le sieur adversaire eut à restituer un argent qui leur appartenait vu le testament de la dame leur mère et qu’elles fussent maintenues dans la possession des biens que ladite dame leur avait donné et légué en jouissance par ledit testament ou elle institue encore pour son héritier général et universel messire d’Auriol de Saint-Padou, officier dans le régiment de Jarnac-Dragons qui est le sieur exposant.

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Munie de ce jugement et du testament de la dame sa mère, demoiselle Marie Thérèse d’Auriol de Langautier… avoir obtenu des demoiselles ses sœurs une procuration à présenter une requête à la cour pour qu’en vertu du testament de ladite dame de Puybusque et en conséquence du jugement rendu par défaut contre le sieur adversaire, cette moitié restante et l’argent destiné au prix du bétail à comme qu’on a fait refluer de cette métairie de la Calèche ou autrement dite de Bannières soit livrée entre ses mains et le baniment levé en sa faveur.

Si Joseph a 65 ans, c’est que nous sommes en 1774, Antoine en a 25.

Voilà les faits et telle est la suite d’un procès si inouï et aussi extraordinaire ou l’on voit d’un côté des tantes ordinairement portées à disputer les droits de leur neveux pour agrandir, nonobstant leur position, les leurs se dépouiller de leurs droits personnels pour défendre ceux de ces mêmes neveux qu’elles plus en droit d’attaquer que le sieur adversaire et d’une autre part, un père à qui la nature devait inspirer des sentiments de tendresse pour les ses enfants et un désir inaltérable de leur agrandissement, n’écouter à l’âge de soixante et cinq ans qu’une cupidité criante et qui fait honte à l’humanité pour dépouiller les seuls enfants qui lui restent, d’un bien modique qui sera peut-être le seul clair et liquide qu’il pourraient avoir au jour ou à l’extrême attention que le sieur de Langautier prend à dissiper le sien propre sans leur en faire part. Qui aurait imaginé que celui qui par sa qualité de père était obligé plus que tout autre de conserver les biens de ses enfants et souhaiter leur avantage, fut le premier dans un âge déjà avancé de se mettre sur les rangs pour anéantir le premier titre que le hasard leur donne et qui leur assure la possession d’un bien qu’ils ont légitimement acquis ? Il n’y a qu’une âme de la même trempe que la sienne qui puisse enfanter une idée aussi révoltante.

Qu’elles prétentions pourraient donc avoir et sur quel titre pourrait être fondé le sieur de Langautier pour ravir à ses enfants un bien qu’ils ont acquis légitimement, ce ne pourrait être qu’en justifiant ou la fausseté ou la nullité d’un testament que le leur donne. Or ce testament n’est ni faux ni nul.

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Le parti donc le plus sûr et le plus raisonnable pour lui est d’abandonner ses injustes prétentions, que les lois condamnent et le bon sens réprouve, et que la nature proscrit et devrait lui interdire.

Ce testament n’est point faux, et cette proposition fera la matière de la première partie de ce mémoire.

Ce testament n’est point nul, et cette proposition en remplira la seconde partie.

Première partie, fausseté

Ce testament n’est point du nombre de ceux que l’on proscrite comme portant avec soi l’empreinte de la fausseté.

Car s’il était faux, ce ne serait qu’en conséquence ou de ce que ladite dame de Puybusque n’aurait point été libre de ses bons sens, n’aurait pas eu bonne mémoire et entendement, voyant et parfaitement parlant de son bon gré comme il est exprimé dans le testament. Où de ce que les demoiselles ses sœurs, ou ses petits-enfants les seuls intéressés dans le maintien de ce testament, ou le sieur Augustin Auriol de Langautier, curé de Fenouillet dans l’intention de faire pièce à son frère auraient capté l’esprit de ladite dame comme il le prétend si gratuitement dans le public ; et auraient obtenu de telles dispositions au préjudice du sieur de Langautier. Or il n’y a aucune de ces deux prétentions qui soient étayées d’un fondement raisonnable, le contraire est prouvé par toutes les circonstances qui ont précédé et suivi l’instant où elle déclara par ledit testament ses dernières volontés, et il est donc clair qu’il n’est point faux.

Premièrement ladite dame de Puybusque jouissait de son bon sens, mémoire et entendement lorsqu’elle déclara ses dernières volontés. Car outre que le sieur adversaire ne prouvera jamais le contraire, et moins encore qu’elle n’eut point le moment lucide de lui accorder par la loi, il est bien plus vrai encore que des personnes respectables et par leur état et par leurs personnes, tels que le sieur abbé Rourard, vicaire de Saint-Martial et de la paroisse située au domaine de Langautier, ni Darail, curé de Saint-Martin, ni Darail curé de Loubens, paroisses voisines dudit domaine, ni l’abbé Raous, vicaire de Vendine est suspecté de prendre les intérêts du sieur adversaire.

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et tant d’autres attesteront s’il le faut, s’il est besoin d’en venir à une audition catégorique comme il s’en vante qu’il y recourrait, attesteront, dis-je, s’il le faut, qu’elle n'a commencé de varier à cause de son grand âge, qu’après l’époque dudit testament. Le sieur de Saint-Padou exposant lui-même quoique partie contraire soutiendra que ladite dame de Puybusque sa grand-mère quelques six ou sept semaines avant sa mort lui tint à peu près ce langage : « Monsieur je crains bien que ce que j’ai fait pour vous ne soit pas dans les formes », lesquelles paroles elle exprima en gascon, d’où il s'en suit :

Enfin, ce qui donne une nouvelle force à la preuve qu’on avance, c’est que Rouraud vicaire de la paroisse qu’elle habitait lui a administré les sacrements de l’église et plusieurs fois en particulier l’auguste sacrement de l’Eucharistie depuis l’époque du testament. Il est donc vrai de dire que ce testament n’est point faux si l’on considère le jugement de la dame testatrice et qu’il a été fait avec connaissance de cause de la part de ladite dame.

En second lieu, ni les demoiselles de Langautier, ni le sieur Augustin d’Auriol de Langautier curé de Fenouillet en vue faire pièce à son frère, ni les petits enfants de ladite dame de Puybusque n’ont point capté l’esprit de cette dame. La dernière de ces demoiselles, appelée Henriette, habitait alors le château de Bellesvilles, demeure ordinaire du sieur adversaire, et y était le jour du testament, ce qu’elle est prête à attester, de même que l’ignorance qu’elle a toujours eu de ce même testament jusqu'après la mort de la dame sa mère, époque à laquelle en fut instruite. Le sieur Augustin d’Auriol de Langautier, curé de Fenouillet était ce jour-là dans la paroisse qu’il gouverne à six lieues de la résidence de la dame sa mère, et attestera qu’il a toujours ignoré jusqu’à sa mort ses dernières dispositions.

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Messire Jean Charles Philibert Antoine d’Auriol de Saint-Padou, fils de l’adversaire et petit-fils et légataire de la dame testatrice faisait son service en qualité de garde du corps de Monsieur frère du roi lors de cette époque.

Mademoiselle Marie-Thérèse Victoire d’Auriol de Saint-Padou, fille de l’adversaire et petite-fille et légataire de la dame de Puybusque était alors au couvent de la Magdelaine où elle est encore comme pensionnaire.

Messire François Marie Joseph d’Auriol de Saint-Padou, fils ainé du sieur adversaire et héritier de ladite dame était pour lors à Montferrand en Auvergne avec le régiment de Jarnac-Dragons dans lequel il a eu l’honneur de servir.

Ces faits ainsi détaillés ne seront point contestés par le sieur Langautier ; et l’on est prêt de justifier comment aucun de ceux que je viens de nommer n’a jamais su jusqu’à la mort de la dame testatrice ses dernières dispositions, excepté le sieur exposant qui en a été instruit six mois environ avant le décès de ladite dame lors de son dernier semestre et qu’il fut rendre visite à la dame sa grand-mère.

En 1776, dans l’année de sa mort, Marie de Puybusque a refait son testament pour faire de Joseph fils son héritier.

Quand autres trois demoiselles et filles de la dame de Puybusque le sieur de Langautier n’a point de preuve pour soutenir qu’elles aient capté l’esprit de la dame leur mère et toutes les auditions catégoriques dont il les menace ne feront rien pour lui. L’on présumera bien plutôt qu’elles n’ont point influé d’en rien dans les dispositions dudit testament mais la teneur même de ce testament, parce qu’il aurait été bien plus naturel de mettre sur leur tête l’hérédité qui a été transportée sur la tête de leur neveu ; il est donc clair que ni les demoiselles de Langautier, filles de la dame testatrice, ni le sieur Augustin d’Auriol de Langautier leur frère pour faire pièce à l’adversaire comme il le prétend lui-même, ni les petits enfants de ladite dame n’ont point capté son esprit lorsqu’elle se décida des régler ses dernières volontés ; et ce qui tranche court toute opposition, c’est que jamais il n’y a de captation d’une fille ou d’un fils à sa mère, ni d’un petit-fils ou petite-fille à sa grand-mère.

De plus, comme je viens de le démontrer ci-dessus, ladite dame de Puybusque jouissait de son bon sens, mémoire et connaissance,

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Lorsqu’elle fit son testament, il est donc vrai de dire qu’il n’est pas faux, et que ce serait sans nul fondement qu’on voudrait le rejeter comme portant l’empreinte de la fausseté.

D’ailleurs, si quelqu’un était en droit de s’inscrire en faux contre un pareil testament, ou d’en demander la cassation, soit comme tel, soit comem nul. Ce n’est point au sieur adversaire à en faire comme autant été fait à son préjudice ; ce que je prouverai dans la suite ; mais ce serait plutôt aux demoiselles ses sœurs qui seraient lésées dans le maintien de ce testament et qui non contentes de s’en tenir et de respecter les dispositions de la dame leur mère soutiennent avec les leurs les droits de leurs neveux. Le sieur de Langautier donc s’est trouvé dans le cas indiqué par la loi nemo audiatur qui non habet jusad Rem, celui qui n’est pas compétent à disputer un bien acquis, soit débouté dans sa demande.

Seconde partie, nullité

Pour bien développer cette seconde partie de ce mémoire et mettre sous le plus grand jour la justice de la cause des demoiselles de Langautier et de leur neveux, contre le sieur Joseph d’Auriol de Langautier, père de ceux-ci et frère des demoiselles, on doit considérer le testament en question ou pris en lui-même ou relativement aux intérêts dudit sieur Joseph d’Auriol Langautier, ou soit qu’on considère les dispositions de ce testament pris en lui-même, soit qu’on les considère relativement aux intérêts du sieur adversaire comme faux.

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Le sieur de Langautier n’est point fondé à disputer au sieur exposant de même que ses deux autres enfants et aux demoiselles ses sœurs la possession desdits biens et par conséquent à demander pour la réjection dudit testament qui la leur assure. Donc ce testament n’est point nul pour ce qui… le sieur adversaire, et il ferait bien d’abandonner ses injustes prétentions et de cesser une indigne poursuite dans laquelle il n’est point compétent.

Ces deux propositions feront le sujet de cette seconde partie de ce mémoire.

Le testament de la dame de Puybusque considéré en lui-même ne porte aucun caractère de nullité. Première proposition.

Le testament en question ne doit point être rejeté comme nul s’il est considéré relativement aux intérêts du sieur de Langautier adversaire et le sieur de Langautier comme tel n’est point compétent à en demander la cassation. Voilà le sujet de la seconde proposition.

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Car si l’on pouvait apercevoir quelque moyen de nullité dans ce testament considéré en lui-même, ce ne pourrait être que quand à la forme ou quand à la personne qui a testé. Or il n’est point nul quant à la forme puisque le nombre de témoins requis par la loi s’y trouve et qu’il ne suffit pas de le dire, on voit qu’il ne pêche en aucun point par la fait et qu’elle avait été captée parce qu’on ne pouvait la croire capable selon lui de faire un testament, si bien limé (ce sont ses propres expressions), comme si la forme du testament ne devait point être de la compétence du notaire qui le transcrit, et devait l’être du testateur ou de la testatrice.

2° le testament point nul quant à la personne qui a testé

Car, s’il était sous ce point de vue, ce ne serait qu’autant que la dame de Puybusque n’était point en état de santé n’ayant que la jouissance et non la propriété des biens énoncés dans ledit testament ou la propriété des biens énoncés dans ledit testament appartenait à la dame de Puybusque testatrice. Donc ledit testament, considéré en lui-même n’est point nul quant à la personne qui a testé.

Il est bien vrai, et nous n’aurons garde de contester ce point au sieur de Langautier, que les biens énoncés ci-dessus appartenaient en propre au sieur de Langautier père de l’adversaire et le mari de dame de Puybusque. Tout le monde convient que par son testament le sieur de Langautier père ne légua à la dame sa femme que la jouissance sa vie durant desdits biens. Il est bien plus vrai encre que ladite dame se démit volontairement de la jouissance d’une partie de l’hérédité en faveur de son fils le sieur de Langautier par un contrat de mariage passé entre lui et la dame Marie Marguerite Françoise de Montlezun, l’année 1745 ou 1746, nous ne contestons point ces faits au sieur adversaire, et ce contrat est le titre principal sur lequel il se fonde pour réclamer des droits en qualité de fidéicommis, sur lesquels il n’aurait aucune prétention, s’il ne pouvait le produire, mais ce même contrat qu’il produit aujourd’hui est le titre même qui l’en exclut, et dès lors il se trouve dans le cas lui de qui on peut dire : mélis est non habere titulum quam habere vitiosum.

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Il vaudrait mieux n’avoir point de titre que d’en avoir un qui nous condamne. Il est bien vrai de dire et je le répète encore que le sieur de Langautier a été nommé au fidéicommis par la dame de Puybusque ; en vertu du pouvoir que lui avait laissé par son testament son dit feu mari, le sieur Jean-Pierre d’Auriol de Langautier, qui lui donnait le choix de rendre l’hérédité après le décès de ladite dame à celui de ses enfants males qu’elle jugerait à propos. Mais le même article ou l’on voit la restitution du fidéicommis fait mention aussi que ce n’est que sous les réservations suivantes, savoir que la dame de Puybusque gardera à soi et au titre des propriétés les biens de Langautier avec la maison, tous les meubles qui y étaient lors de ce contrat, les biens d’Embaisse et les biens situés dans Banniez, c’est-à-dire la Calèche avec toutes leurs appartenances et dépendances ou que le tout soit sis et situé. À quoi, le sieur de Langautier a consenti, sans laquelle condition, ladite dame de Puybusque déclare qu’elle n’aurait pas cédé le fidéicommis à son dit fils le sieur Joseph de Langautier.

D’où l’on peut raisonner ainsi : le sieur de Langautier acceptant le fidéicommis a cédé la propriété des biens énoncés dans le testament ou il n’est point fondé à revenir sur ce pareil contrat. Donc ces biens énoncés lui appartenaient en propriété à la dame de Puybusque alors qu’elle fit son testament. Sur quels titres pourraient être fondés le sieur adversaire pour revenir sur un pareil contrat, ce ne peut-être ou qu’autant que ses enfants seraient un obstacle à un pareil contrat ou qu’autant qu’il aurait capté l’esprit de la dame sa mère n’achetant une hérédité que son frère aurait pu avoir et son préjudice, s’il n’eut acquiescé à ces conditions ou qu’il aurait été capté par ladite dame sa mère,

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ou qu’il aurait été considérablement lésé dans cet article de son contrat de mariage. Ce ne serait en cinquième lieu qu’autant qu’un fidéicommis est une chose sacrée sur laquelle celui qui le restitue ne peut rien retrancher ou parce qu’enfin ce serait une donation sur laquelle il a droit de reprise en survivant au donataire. Ou toutes ces raisons ne sont que de vains subterfuges dont l’adversaire est capable d’éblouir le public pour réveiller impunément les cendres de la madame sa mère et raviver en méprisant ses dernières volontés à ses propres enfants un bien qu’elle leur a donné et qu’il devrait plutôt accroître en leur faisant part, surtout à son âge, des siens propres à qui la nature leur a donné un droit légitime. Plutôt que de chercher à leur enlever celui qu’il dissipe lui seul comme il fait journellement de celui dont il jouit et qu’il devrait leur conserver.

1° Les enfants du sieur adversaire ne son point un obstacle suffisant comme il le prétend dans le public pour revenir sur un pareil contrat puisque l’hérédité qu’il a reçue n’est point une substitution qui doive tomber sur la tête de ses enfants, et qu’il pouvait la tenir comme son propre bien ce que sa conduite journalière en prouve que trop quand il dissipe celui qu’il possède. Et ce qui tranche court toute opposition et qui dévoile la mauvaise foi de celui qu’il pourrait objecter une telle si faible raison pour fasciner les gens du public et de ses propres enfants même. La dame de Puybusque a donné à ces mêmes enfants les mêmes droits qu’il aurait pu avoir dans l’hypothèse qu’elle eut réuni sur sa tête ce qu’elle leur a cédé dans son testament.

2° Son frère Augustin d’Auriol de Langautier n’est pas non plus un obstacle suffisant pour rejeter cet article, car outre que le sieur adversaire se déshonorerait s’il osait avancer qu’il a capté l’esprit de la dame sa mère en lui achetant un fidéicommis auquel son frère aurait droit aussi bien que lui ; il n’a acquiescé ou peut-être proposé à la dame sa mère un tel marché.

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1° ce ne serait pas à lui à demander la rejection d’un pareil contrat mais à son frère

2° il s’avouerait coupable d’arracher par surprise une hérédité à laquelle un autre que lui aurait le même droit, et se rangerait dans la classe de ceux que la loi défend d’écouter dans leurs injustes prétentions : nemo infletus reux propria causa, l’on ne doit avoir aucun égard aux injustes demandes de celui qui est obligé de s’avouer coupable dans sa propre cause.

3° il ouvrirait une carrière au sieur Augustin d’Auriol son frère pour lui demander compte de son hérédité qu’il aurait surprise à la dame sa mère par cette supercherie. Il serait en conséquence forcé de restituer la moitié des biens qu’il aurait possédé illégitimement avec les intérêts de cette moitié depuis trente ans. Personne n’ayant été désigné à un fidéicommis ou le sieur Augustin d’Auriol est appelé par le testament de son père tout aussi bien que le sieur adversaire.

4° il n’a point été capté par la dame sa mère et forcé par autorité maternelle à acquiescer à un pareil contrat ou s’il déclare qu’il a acquiescé lui-même, puisqu’il l’avait passé de saine et libre volonté, qu’il avait passé l’âge requis par la loi pour aliéner son bien, qu’il trouvait à passer un tel contrat un plus grand avantage à la dame sa mère qui se dépouillait pour un modique dédommagement de la jouissance d’une hérédité qu’il aurait attendu trop longtemps à son gré s’il n’eut pu la recueillir dans le temps que la dame sa mère était en droit de la lui restituer, et que personne n’ignore, ce qu’il pourra disconvenir si même qu’il avait une emprise absolu dans son esprit et qu’elle soit pour lui pour ainsi dire la même déférence fondée sur la faiblesse qu’il aurait dû avoir pour elle.

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Il est donc clair qu’elle ne se servit point du pouvoir pour obtenir par force une chose à laquelle elle n’avait point droit de prétendre. Le sieur adversaire se gardera bien d’avancer ce fait, et on ose le défier de le prouver.

5° il n’est point en droit de revenir sur un tel contrat étant lésé d’autre moitié puisque après avoir prélevé les droits des demoiselles ses sœurs, qu’elles pourraient avoir ces biens quand bien même elles n’auraient d’autre titre que le testament de feu d’Auriol de Langautier leur père pour réclamer leurs droits, les parts en sus ne pourraient jamais égaler la jouissance de trente années des biens que ladite mère céda à son fils lors de ce contrat.

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En vain opposerait l’adversaire un fidéicommis est une chose sacrées sur laquelle on ne peut rien retrancher ; parce que outre qu’il serait blâmé par le public d’avoir joui de mauvaise foi pendant plus de trente ans du fidéicommis qu’elle aurait pu garder jusqu’à sa mort à la faveur d’un contrat qu’il n’ignore point être son ouvrage.

1° il ne doit point ignorer que si un fidéicommis est un acte sacré, un contrat de mariage ne l’est pas moins

2° parce que… doit porter la peine d’avoir transgressé la loi sur laquelle l’adversaire s’appuie si fort. C’est lui seul comme le seul coupable puisque pour extorquer à la dame sa mère la jouissance d’un bien qu’il aurait trop attendu il consent à lui accorder une propriété qu’il devait lui disputer après la mort. Il n’eut du voir rien de plus révoltant.

3° parce que le fidéicommis qui devait être restitué au sieur adversaire n’étant point fixé par le testament de feu sieur Jean-Pierre d’Auriol de Langautier son père, et étant d’une nature à pouvoir se restreindre puisqu’elle avait le pouvoir d’avantager tel ou tel de ses enfants qu’elle jugerait à propos, il n’est point de sceller un fidéicommis limité qui est le seul que cette loi regarde. Ou il s’en suit que si la dame de Puybusque n’a point rempli l’intention du testateur ne donnant point à ses propres enfants des biens qu’elle pouvait se réserver du fidéicommis, c’est à ces mêmes enfants unis ensemble à disputer aux héritiers un bien dont la dame ne pouvait disposer qu’en la faveur, non pas à celui à qui sa qualité de père interdisait plus qu’à tout autre une pareille démarche.

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4° parce que n’étant désigné fidéicommissaire dès cet instant, l’hérédité devenait son propre bien qu’il pouvait aliéner lui-même et pouvait céder la propriété d’une partie à la dame sa mère et accepter un fidéicommis sous une convention qu’il faisait lui-même, et à laquelle il s’était soumis.

5° enfin parce que les fidéicommis si bien conservés par la loi dans toute leur intégrité sont ceux qui étant fixés par le testateur doivent être réunis de suite après sa mort à celui désigné par le testateur. Ou la dame de Puybusque pouvait en jouir sa vie durant, le sieur adversaire n’était point désigné pour la recueillir dans toute son étendue. Le… n’était point fixé par le testateur, elle n’était pas donc obligée de le restituer dans toute son étendue et elle pouvait se dédommager de la perte d’une hérédité dont elle aurait pu jouir encore plus de trente années, en se réservant la propriété d’un bien qui n’égalait pas la jouissance dont elle se privait pas un acte sacré que l’adversaire n’ignore point être son ouvrage. De même, l’on voit tous les jours des… à la propriété d’une partie de l’hérédité laissée par substitution qui est une chose aussi sacrée qu’un fidéicommis pour obtenir une part d’un bien que l’on n’aurait en en entier qu’après une mort qu’il aurait fallu attendre trop longtemps.

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De même que les parents d’une femme que par sa mort laisse à son mari toute sa vie durant la jouissance de tous ses biens, s’accommodent avec lui, en lui cédant en propriété partie de ces biens dont il avait droit de jouir en entier toute sa vie ; et le sieur adversaire après avoir possédé injustement et de mauvaise foi pendant plus de trente ans une jouissance que la dame sa mère avait droit de conserver pendant ces mêmes années qu’elle a vécu depuis l’époque de ce contrat, aurait le droit après sa mort de lui disputer la propriété d’un bien qu’elle avait acquis par la cession de l’hérédité, à l’ombre de ces mêmes lois, que d’autres n’ont jamais osé réclamer pour maintenir dans leur intégrité des actes et des contrats que ne sont pas moins sacrés qu’un fidéicommis, et n’ayant pour but que de dépouiller ses trois enfants de ces mêmes biens que la dame testatrice leur a rendu. La cour sera indignée d’une attaque si monstrueuse, et n’écoutera point une demande aussi révoltante et aussi inouïe.

6° enfin cette cession que le sieur adversaire a fait à la dame sa mère n’est point une donation sur laquelle il a droit de reprise en survivant au donataire, parce que 1° s’il en était ainsi, cette propriété eut été illusoire puisqu’il est naturel qu’un fils doit survivre à sa mère, 2° parce que si cette cession devait être regardée comme une donation, elle ne serait point de celles sur lesquelles on a droit de reprise après la mort du donataire, celles de ce genre étant une donation corpus mortis, c’est-à-dire lorsque le donataire ne doit jouir des biens donnés qu’après la mort du donataire, et celle-ci étant une donation inter vivos c’est-à-dire que le donataire possède dès cet instant le droit d’aliéner les biens qui ont été cédés par le donataire, il est donc clair cette cession que le sieur adversaire a fait à la dame sa mère n’est point une donation sur laquelle il ait droit de reprise après la mort de la dame sa mère comme il le prétend dans le public.

De plus, comme je l’ai déjà démontré, la loi qui défend de rien retrancher à un fidéicommis n’est point dans la d’ailleurs il n’est point nul quant à la forme comme je l’ai fait voir auparavant, donc ledit testament considéré en lui-même ne doit point être rejeté comme nul et c’est ma première proposition.

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Seconde proposition

Le testament de la dame de Puybusque ne porte avec soi thèse de nullité s’il n’est considéré relativement aux intérêts du sieur Langautier comme fidéicommis, et le sieur de Langautier comme tel, n’est point compétent à en demander la cassation. Cette proposition qui se réduit à fin de non-recevoir est prise du défaut d’action et par conséquent de qualité pour faire déclarer le sieur de Saint-Padou, officier du régiment de Jarnac-Dragons, le sieur de Saint-Padou son frère, garde du corps et la demoiselle de Saint-Padou leur sœur incapable de recueillir l’institution héréditaire faite en leur faveur.

L’intérêt est la seule règle et la mesure de toutes les actions, c’est l’intérêt seul qui donne qualité et action…

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Supplément

Le sieur adversaire que l’intérêt a toujours dirigé dans toutes ses actions au point de sacrifier sa propre famille a ses monstrueux desseins, et qui ne cesse de semer dans le public pour parvenir à ses fins des chicanes multipliées les unes sur les autres, non content de chercher à dépouiller ses propres enfants qui sont pour lui dans ce jour un obstacle, a la fureur de dissiper les biens de leurs aïeux, est capable d’entasser des ressorts cachés les uns sur les autres pour leur ravir celui qu’il ne voit que trop à l’abri de ses dispositions continuelles. Il semble qu’il leur envie la satisfaction de trouver un jour après sa mort quelque chose qu’il n’ait point achevé de confondre.

Mais ses efforts sont inutiles et il en tirera d’autre avantage d’un attentat aussi détestable que celui de se déshonorer dans le public et de se faire haïr et mépriser par tous les gens de bien et de se montrer tel qu’il est aux yeux de ce même public à pure perte ne faisant voir à tout le monde ses sentiments dénaturés.

Car premièrement, le testament de la dame de Puybusque qui favorise ses enfants est à l’abri de toute atteinte et tous les efforts que le sieur adversaire pourrait employer pour la détruire tombent d’eux même.

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Secondement, quand bien même le sieur adversaire viendrait à bout de la détruire, il ne peut se porter pour héritier universel desdits bien, et il n’aurait point d’autre droit sur cette portion dont il aurait privé ses propres enfants, que le même que ses sœurs y auraient s’il n’y avait point de testament.

Et c’est le sieur adversaire qui par sa qualité de père devrait maintenir plus que tout autre une institution qui favorise ses propres enfants, c’est lui, dis-je qui se met sur les rangs pour l’anéantir, n’ayant point d’autre droit sur les biens qu’ils ont acquis, que ses sœurs qui par leur qualité de tante devraient plutôt que lui demander la rejection et que cependant défendent leurs neveux contre leur père même et lui apprennent à concevoir des sentiments que la nature seule devrait lui inspirer.

Le testament en question doit être maintenu dans toute sa vigueur et ce sera ma première proposition.

Quand bien même le testament en question devrait être cassé, le sieur adversaire ne pourrait en conséquence de cette cassation se porter pour héritier dans le partage desdits biens et ne pourrait s’y porter tout au plus que comme légitime et ce sera ma seconde proposition.

Première proposition

Le testament en question est à l’abri de la moindre altération.

Ce testament en question ne pourrait être cassé qu’autant qu’il serait ou faux ou nul. Or il n’est ni nul ni faux, donc on ne doit avoir aucun égard aux demandes injustes du sieur adversaire.

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Premièrement, il n’est point faux, comme je l’ai déjà prouvé dans ce mémoire.

Secondement, il n’est point nul, car s’il devait être rejeté comme tel, ce ne serait qu’autant qu’il le devrait par la forme ou parce que la dame testatrice n’était point capable desdits biens, ou ledit testament n’est point nul quant à la forme et la dame testatrice était capable de tester ces dits biens. Donc il n’est point nul.

1° , ledit testament ne pêche point par la forme comme il est aisé de le voir par l’inspection seule dudit testament et comme je l’ai prouvé dans ce mémoire.

2° , la dame testatrice était… la propriété de ces mêmes biens qui font… inouïe, lui eut été acquise légitimement avant ledit testament. Il suffit en second lieu, que quand bien même les dits biens disputés par le sieur adversaire eussent été inaliénables de leur nature ; la dame testatrice n’avait que le pouvoir de disposer d’un fond plus grand encore, hypothèque sur les biens de l’adversaire ou non seulement la dame de Puybusque avait acquis légitimement la propriété desdits biens ; mais encore le corps de l’hérédité doit répondre d’un fonds plus grand encore que par en sus des légitimes paternelles qui le restera payer, lequel fond dépendant un bien maternel, elle pouvait en disposer, donc la dame de Puybusque était capable de tester desdits biens.

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dame de Puybusque avait en propriété les dits biens lorsqu’elle fit son testament, comme je l’ai assez démontré 1° dans ce mémoire, 2° parce que n’y ayant aucune loi qui puisse défendre d’aliéner son propre bien, il n’y en a aucune aussi qui dit qu’empêcher le sieur de Langautier en acceptant un fidéicommis qui n’était point fixé par feu Jean-Pierre d’Auriol de Langautier auquel il n’était pas donné expressément dans le testament dudit feu Jena Pierre d’Auriol de Langautier et dont la dame testatrice pouvait jouir jusqu’à sa mort ; il n’y a point de loi qui ait pu empêcher le sieur adversaire de lui céder en propriété un bien qui pouvait à peine la dédommager des jouissances dont elle se priva en sa faveur ; il n’y a donc point de loi qui puisse autoriser le sieur adversaire de revenir sur un contrat aussi sacré qu’un fidéicommis et il n’est point lésé ou il trouvait son avantage qu’il avait passé dans l’âge prescrit par la loi pour disposer de son bien, ou il est marqué qu’il a consenti lui-même et qui fut peut-être son ouvrage.

Donc la dame de Puybusque avait la propriété desdits biens, laquelle fil son testament.

Quand bien même les dits biens eussent été inaliénables de leur nature, la dame testatrice pouvait en disposer comme elle a fait dans le testament en question.

Car personne n’ignore que feu Jean-Pierre d’Auriol de Langautier lui laissa à la dame testatrice son épouse la jouissance du corps de l’hérédité jusqu’à la mort à la charge par elle de payer les légitimes telles que de droit

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C’est-à-dire précisément la jouissance entière du fidéicommis qui est la portion qu’elle céda dans le contrat de mariage, par conséquent, ladite dame était en droit de jouir encore trente ans des biens qu’elle céda à son dit fils.

Il n’est pas moins vrai de dire qu’elle ne restitua le fidéicommis à son fils que sous les réservations suivantes qu’elle garderait à soi et à titre de propriété les biens restants, que le sieur adversaire y a consenti, comme il est dit dans ce contrat, à quoi le sieur de Langautier a consenti et que sans ces conditions, ladite dame de Puybusque déclare qu’elle n’aurait pas cédé le fidéicommis au dit sieur de Langautier son fils.

Donc, il est clair que le sieur adversaire n’a obtenu que sous cette condition un fidéicommis qu’elle pouvait garder jusqu’à sa mort ; donc il a privé la dame sa mère des jouissances dudit fidéicommis à l’ombre seule d’une condition qu’il a dicté peut-être lui-même par l’avantage qu’il trouvait de céder une modique partie de l’hérédité pour obtenir un bien qu’il aurait trop attendu ou si l’on considère l’intention de feu Jean-Pierre d’Auriol de Langautier, testateur, la dame de Puybusque avait le même droit sur ses jouissances que le sieur adversaire sur l’entière hérédité. Donc si d’une part, le sieur adversaire a droit de reprise sur un bien qu’il a démembré du fidéicommis, la dame sa mère d’une autre part, aurait le même droit de réclamer des jouissances qu’elle n’a cédée à son fils que sous cette condition desquelles jouissances elle aurait pu se faire un fond, si elle eut ne les cédées.

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Donc les héritiers de ladite dame qui la représentent dans ses droits, auraient celui de les réclamer ou des jouissances équivalent a plus de 40,000 livres et les biens que le sieur adversaire a cédé en propriété à la dame sa mère valent à peine 20.000 livres si l’on prélève les légitimes et les droits des demoiselles de Langautier dans la supposition qu’elles n’auraient d’autre titre pour les réclamer que le testament de leur père ; puisque en comprenant le sieur adversaire même, il y a six légitime à payer, un septième à partager entre les six légitimaires restants. Une légitime payée tirée des épargnes desdits biens et qui doit représenter pour les dits biens, mille écus cédés à deux légitimaires par la dame de Puybusque en vertu du pouvoir qu’elle en avait reçu de son feu mari et que ces mêmes biens que la dame de Puybusque se réservera pour lors en propriété et pour payer les dites légitimes en valent à peine 10,000.

Donc, si le sieur adversaire réclame les 20.000 livres qu’il céda en propriété à la dame sa mère comme faisant partie d’un fidéicommis qu’on ne peut retrancher, les héritiers de la dame de Puybusque représentant ses droits après sa mort seront autorisés à lui demander à leur tour les 40.000 livres de jouissances dont il les priva par cet accord et dont elle aurait pu disposer.

Donc la dame de Puybusque pouvait disposer des biens soi-disant paternels en représentation de ces jouissances dont le sieur adversaire lui extorqua sous des conditions

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auxquelles il consentit dans un contrat qui fut peut-être son ouvrage, elle pouvait, dis-je, en disposer comme elle l’a fait dans son dernier testament, quand bien même comem le sieur adversaire le prétend, les dits biens cédés en propriété à la dame testatrice n’eussent pu être démembrés du fidéicommis par le fidéicommis lui-même.

D’ailleurs, la dame testatrice avait effectivement la propriété desdits biens lorsqu’elle en disposa dans son dernier testament du 10 janvier 1774. Donc ledit testament n’est point nul.

D’ailleurs, il ne porte aucune empreinte de fausseté. Dont ledit testament bien loin d’être susceptible de cassation doit être maintenu dans toute sa force et son étendue et est ma première proposition.

Seconde proposition

Quand bien même le testament en question serait susceptible de cassation, le sieur de Langautier ne pourrait en conséquence de cette cassation se porter pour héritier universel et général dans la possession desdits biens et dans le partage d’iceux, il ne pourrait tout au plus se porter que comme légitimaire.

Supposons un instant que le testament de ladite dame de Puybusque ne soit point à l’abri d’être rejeté comme nul ; puisque ledit testament a pour titre l’article d’un contrat de mariage du sieur adversaire ou le sieur adversaire même cède de libre volonté la propriété desdits biens, supposons donc que ce titre translatif de propriété doive être

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Rejeté comme nul, supposons encore qu’on puisse anéantir un pareil article sans anéantir la désignation que la dame de Puybusque ne fit cependant que sous cette même réservation ; ce qui… répugner à la raison ou la justice ou au bon sens ; il n’en sera pas moins vrai que depuis cette époque il est exclu de toute prétention sur les biens contentieux, à moins qu’il ne s’y porte comme légitimaire.

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Personne jamais ne lui a contesté ce droit, et on est prêt à lui accorder toutes les justes demandes qu’il pourrait faire en cette qualité. Mais lorsque le sieur adversaire voudra se faire reconnaître comme le seul et unique héritier et qu’il voudra en cette qualité faire le partage desdits biens les demoiselles de Langautier seront toujours en droit de ne point le reconnaître comme tel et de récuser l’autorité qui leur assigne leur position.

Car la dame de Puybusque comme il est marqué dans le contrat de mariage du sieur adversaire se réserva en propriété les biens contentieux. C’est un fait qu’on ne peut contester au moyen desquels biens, ladite dame sera tenue de nourrir et entretenir et payer les légitimes aux autres enfants de feu

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Jean-Pierre d’Auriol de Langautier père et testateur. Par conséquent, le sieur adversaire a démembré le fidéicommis et transporté la propriété de ces biens détachés dudit fidéicommis sur la tête de la dame sa mère pour payer les légitimes. Dons ces biens démembrés est justement ce qui constitue les dites légitimes si on n’a jamais vu de lois qui autorisent un fidéicommis à un héritier à revenir sur un tel partage et ce sont les seuls légitimaires qui puissent se plaindre s’ils sont lésés d’autre moitié ; donc se serait plutôt aux demoiselles de Langautier de se plaindre d’un tel partage si elles étaient lésées d’autre moitié.

Elles ne s’en plaignent point cependant et se contentent de cette portion, donc la renonciation que le sieur adversaire fit dans un contrat sacré ou il consentit volontairement auxdits biens énoncés est à l’abri de la moindre atteinte, outre que le terme fixé pour revenir sur un contrat est échu puisqu’il y a plus de 30 ans depuis cette époque. Donc le sieur adversaire ne peut plus réunir à son fidéicommis ce qu’il en a détaché lui-même pour les légitimes, et la même loi qui défend de tronquer un fidéicommis ne défend point à celui qui l’accepte d’en rien retrancher pour l’avantage des légitimes, à moins qu’au moyen de cet avantage les légitimes autorisés en corps n’excédent de beaucoup el corps du fidéicommis qu’il a reçu ou cet inconvénient ne peut avoir lieu dans les circonstances présentes puisque la part que le sieur adversaire retira à soi vaut aux environs de 44.000 livres, au moins et que celle qu’il a laissé pour les légitimes saut au plus 10.000 livres.

Donc le sieur adversaire ne pouvait se porter comme héritier et fidéicommis, il peut tout au plus s’y porter comme légitimaire.

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Quand bien le testament de ladite dame serait nul et c’est ma seconde proposition.

D’ailleurs, ledit testament n’est point nul comme je l’ai démontré dans ma première proposition de ces suppléments et dans la seconde partie de ce mémoire.

Donc le sieur adversaire doit se contenter d’une légitime qu’on pourrait lui accorder si la dame de Puybusque était montrée ab intestat.

Qu’elles prétentions pouvaient donc avoir le sieur adversaire pour troubler les dites demoiselles sœurs et ses trois enfants dans leurs possessions et quels motifs animes les dites demoiselles à défendre au titre qui le leur assure. Il est bien aisé de la connaître si l’on considère d’un côté le caractère du sieur adversaire et d’une autre part ce que les dites demoiselles ont souffert à son occasion.

L’on sera saisi d’indignation à la vue de la souffrance que les dites demoiselles ont essuyées à l’occasion du sieur adversaire, et que l’on n’ignore point après la lecture qu’on peut en faire dans l’instruction du cours de ce procès que j’ai tracé dans ce mémoire.

Si l’on considère le caractère du sieur adversaire l’on ne sera point surpris que les demoiselles ses sœurs défendent avec chaleur un titre qui leur assure la possession des biens contentieux et l’on sera instruit des motifs qui animent le sieur de Langautier leur frère à l’attaque de toutes ses forces.

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Car sa façon d’agir continuelle en matière d’intérêt surtout envers sa famille, que les demoiselles n’ont déjà que trop éprouvé pendant les 30 dernières années que ladite leur mère a eu comme on peut le lire au commencement de ce mémoire, ne prouve que trop qu’il s’en faudrait de beaucoup qu’il ne leur fit à chacune leurs droits avec la plus exacte justice et sans contestation et ne dévoile que trop ses projets odieux : ce qu’il sera de plus très aisé de prouver lorsqu’il sera forcé d’avoir recours à des transactions soi-disant, qui ne sont point contrôlées, ou elles sont évidemment lésées d’autre moitié quand elles n’auraient point d’autre droit que le testament de feu leur père le sieur d’Auriol de Langautier, et auxquelles il les a forcées en leur disant qu’il faudrait plaider si elle ne transigeaient point à une somme modique quelconque. Tel est le langage qu’il leur tenait dans un temps où il croyait que la dame sa mère le ferait son héritier universel ou qu’il ne trouverait point d’obstacle à ses injustes prétentions, ce que la demoiselle Henriette d’Auriol de Langautier est prête d’attester comme ayant été la victime d’un procédé condamnable sans que néanmoins elle se fut laissée vaincre par les menaces.

Si le sieur adversaire avait un motif aussi révoltant qui peut l’exciter à contester à la dame sa mère après sa mort une propriété qu’il lui avait cédée volontairement par un contrat sacré auquel il consenti lui-même ; et qui peut-être son ouvrage vu les avantages qu’il en retirait. Les demoiselles ses sœurs, qui ont après à connaître par leur expérience propre les détestables desseins qui l’animent en ce moment dans son indigne poursuite, pour écarter l’orage d’iniquités qui les menace, s’il est autorisé comme il le désire à leur assigner à chacune leur part des biens de leurs aïeux, ces mêmes titres à la main, implorent la justice pour les sauver de la furie d’un homme affamé, qui est aux aguets pour saisir l’instant favorable, ou comme le seul héritier, il pourrait en cette qualité exercer à leur dépends les concussions et ses mauvais procédés ordinaires.

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La cours ne souffrira pas que le plus fort opprime le plus faible et que sous le masque voilé de la justice, la mauvaise… impunément des arrhes que les lois qui ne prévoient pas toutes les circonstances pourraient lui procurer. Et s’il est des lois qui défendent de ne rien altérer d’un fidéicommis, il en est aussi qui rendent un contrat de mariage aussi sacré ; s’il est des lois qui le favorise dans ses projets odieux, il en est aussi, il s’en créerait plutôt pour lui interdire pour toujours des prétentions aussi révoltantes et contraires mêmes à l’équité naturelle.

Fin

1786, Délibération demandée par Joseph

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Le conseil soussigné qui :

délibérant sur les questions proposées est une :

  1. Que les réservations faites par la dame de Puybusque dans le contrat de mariage du consulat à titre de propriété d’une partie des biens qu’elle avait été chargée par le testament du 11 octobre 17... de rendre à tel de ses enfants mâles qu’elle jugerait à propos, n’ont pu être valablement faites et qu’elles n’aurait dû empêcher le consultant élu au fidéicommis, de réclamer les entiers biens qui devait le compenser aux termes du testament du sieur son père.

    En effet l’on tient pour certain dans le droit que la faculté d’élire par le testateur à celui qu’il charge de rendre le legs ou l’hérédité ne constitue sur la tête du… que nudum numiterium en sorte qu’il ne dépend point de l’éliseur d’imposer aucune condition à celui qu’il élit qui ne tient son legs que de la 1ère disposition…C’est d’après ces principes que M. de Furgole dans ses additions au traité des testaments… décide que les conditions imposées par l’élisant à son profit et qui tendent à diminuer la fidéicommis, devant être rejetées viliantur et non viliant. Sur ces principes qu’est fondé l’arrêt du 20 mai 1772 rapporté par Vedel sur Catte… l’arrêt du 2 mai 1738… ne peut être appliqué… l’arrêt du 23 juillet 1777 rendu… il faut tenir pour comptant que l’hérédité grevé avec la faculté d’élire ne peut rien retenir en propriété des biens qu’il est chargé de rendre et que la réservation qu’il fait à titre de propriété de partie des biens dépendants du fidéicommis est comme non advenue sans néanmoins que l’élection soit nulle viviatur sed non vitae.

    Due que l’héritier grevé qui restitue le fidéicommis par anticipation à l’un des éligibles pour retenir à soi la propriété de partie des biens fidéicommis comme le prix de la renonciation à la jouissance de ceux qu’il abandonne par anticipation mais alors que deviendrait la volonté du substituant qui a voulu que ses entiers biens… sur la tête de celui que son héritier grevé élirait, celui encore qui tient son droit de testateur et non de l’élisant sus acquirit ex testament, la charge de rendre les entiers biens et de ne retenir par conséquent sa propriété d’aucuns et une condition irréfragable et inséparable de la libéralité qu’a reçu l’héritier grevé dicat testatir et eri lex.

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  1. Il est bien vrai que la dame de Puybusque aurait pu élire des éligibles appelés par les testateur mais elle ne l’a pas fait, elle a retenu jusqu’à sa mort les biens qu’elle avait réservés lors du mariage de son fils et l’héritier qu’elle a institué n’était pas exigible en sorte que les biens dépendants du fidéicommis n’auraient pu par la voie de cette institution passer sur la tête de ses héritiers quoique fit le consultant.

  2. La dame, au terme du testament de 1735 avait la liberté d’avantager au-dessus de la légitime tel ou tel de ses enfants qu’elle jugerait à propose, mais elle ne l’a pas fait… borne de leur légitime paternelle…pas user de la faculté du testant son mari que le consultant était fondé de sa requête de 1776 que sans s’arrêter à la clause du contrat de mariage contenant rétention de partie fidéicommis comme il fut maintenu dans le droit de jouir de l’entièreté de l’hérédité de son père. Cette demande n’aurait dû souffrir alors aucune difficulté parce qu’à cette époque il ne s’était point écoulé trente années depuis la rédaction en acte public des articles de mariage du consultant.

  3. Le consultant serait encore fondé à soutenir la même prétention aujourd’hui de l’instance dans laquelle il avait formé la demande avait été entretenue ou par la mort de quelqu’une des parties ou par la mort ou démission des parties ou par la mort ou démission de quelqu’un des procureurs de l’instance survenues dans l’intervalle de 3 ans à compte des derniers errements de l’instance car autrement il est sans ressource parce que la péremption de l’instruction ayant entrainée la prescription d’après les principes les plus sains de la matière et… ordonnance de Roussillon de 1563. Le consultant n’a aucune voie contre le consentement qu’il donne dans ses articles de mariage à la rétention que fit la dame sa mère de partie des biens dépendants du fidéicommis.

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  1. Le consultant sera toujours fondé à réclamer une légitime sur les biens de sa mère, cette légitime devra lui être expédiée sur les entiers biens délaissés par ladite mère, même sur ceux qu’elle réserve de l’hérédité de son mari. Dans le cas où il ne puisse point continuer ses poursuites de l’instance dans laquelle il avait demandé en 1776 d’être maintenu au droit de jouir les entiers biens délaissés par son père.

  2. Il n’y aura point lieu à l’imputation des sommes que le consultant avait reçues de l’hérédité de son père avant son mariage en vertu de la procuration de la dame sa mère parce que lors de ses articles de mariage la dame lui avait abandonné toutes celles qu’il avait exigées.

  3. Le consultant est aussi en droit de rappeler ce qu’il a payé à la dame Marianne de Langautier sa sœur sur la légitime paternelle, laquelle légitime était à la charge de la dame de Puybusque aux termes des articles de mariage du consultant.

Délibéré à Toulouse, 6 avril 1786